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 Porter une ambition politique de transformation sociétale

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L’Économie Sociale et Solidaire, au-delà de ses entreprises, porte une ambition politique de transformation sociétale. Cette transformation ne peut s’opérer sans une remise en cause profonde de la forte prépondérance de l’économie de marché, centrée sur la croissance quantitative ; toujours plus de biens et de services, pour toujours plus de consommation. La croissance, brandie comme étendard, mesurée avec force indicateurs parmi lesquels le PIB (Produit Intérieur Brut) et outils de performance financière telle que la notation financière, qui attribue aux entreprises ou aux États des cotations dont le graal est le AAA !, figure au premier plan des tableaux de bord nationaux, plaçant cette croissance au cœur du fonctionnement sociétal.


Il n’est plus guère discuté aujourd’hui le fait que cette course à la croissance soit la source de désastres environnementaux, de dérèglements climatiques, de perte de la biodiversité, de développement des inégalités sociales et professionnelles, d’individualisme grandissant du fait d’une réduction des citoyens à la situation passive de consommateur ou d’ayant droit (attente vis-à-vis des services publics), de délitement démocratique par un abandon du politique à l’économique. Et pourtant, nous poursuivons dans la même voie, tant la transformation sociétale semble insurmontable, trop révolutionnaire, remettant en cause trop d’acquis, matériels, sociaux, culturels pour les uns, n’offrant pas de réponse à court terme pour les autres, noyés dans le présent, pour qui demain est déjà trop loin.

Cette économie de marché place l’économie publique (redistribution), notamment en France, et l’ESS, en position d’économies de réparations. Cette dominante du marché et ses conséquences, nous contraint aujourd’hui à des transitions démocratiques, sociales, environnementales, également appelées de leurs vœux par les tenants de l’économie de marché eux-mêmes.

Pour ce faire, fleurissent approches et outils au service de ces incontournables transitions ; Ils se nomment : Responsabilité Sociétale des Entreprises (RSE), Entreprises à mission, Fondations d’entreprises, Mécénat d’entreprises, sans oublier les nombreux labels ou référentiels normatifs... Si ces outils et pratiques peuvent servir une adaptation de l’économie dominante aux enjeux, ils restent néanmoins peu efficients pour transformer les modèles qui les ont fait naitre, et donc résoudre les questions afférentes. Ils portent, de mon point de vue, l’intérêt indéniable de sensibiliser les acteurs. A ce titre, il est de notre responsabilité de développer les coopérations ; avec les entreprises, qui témoignent de leur volonté d’actions, afin de diffuser notre projet, et pour se faire, de construire des alliances avec leurs différentes parties prenantes ; salariés, clients, administrateurs..., avec les élus qui s’engagent au quotidien pour conduire les transitions, en les accompagnants dans ce qui est notre ADN, la mobilisation citoyenne.
Cependant la transformation passera obligatoirement par une refonte totale de nos approches économiques, un dépassement du discours enfermant ; « Il faut produire de la croissance, qui elle va produire des richesses, qui elles permettront de dégager des ressources publiques, qui permettront la redistribution ».

Sur les transitions environnementales ;

Nous sommes invités à modifier les motorisations de nos véhicules (développement du marché des moteurs électriques qui nécessitent des forages de lithium, une consommation énergétique importante, quelle que soit son origine...) quand la transformation est à rechercher dans une réduction drastique du nombre de véhicules (nécessité de penser aménagement du territoire, transports collectifs), dans la limitation des transports aériens de courtes distances pour privilégier le ferroviaire, réduction drastique du transport routier ...

Sur les transitions alimentaires ;

Nous sommes invités à regarder ce que nous mettons dans notre assiette, à manger bio, développant ainsi un marché parallèle à celui de l’agriculture traditionnelle qui elle, reste autorisée à produire avec des produits et des méthodes que chacun sait délétères. Ce faisant, perdure un double marché, le premier accessible aux populations qui en ont les moyens financiers, culturels, tandis que le plus grand nombre est contraint à une consommation de produits nocifs pour la santé de l’homme et de son environnement. De nombreux agriculteurs participent activement à l’évolution des modèles pour faire vivre l’essence même de leur métier de paysan, au savoir-faire propre à leur terroir d’implantation, sans pour autant rechercher quelque label que ce soit. Les acteurs de l’ESS que nous sommes avons à nous engager à leurs côtés.

Sur le traitement des déchets ;

Nous sommes invités à circulariser l’économie afin de donner une nouvelle vie aux rebus de l’économie de marché, créant, là aussi, un second marché de la récupération (on parle désormais de « gisement » de déchets) qui, si nous n’y prenons garde, peut alimenter le premier, quand il conviendrait de limiter ces rebus par des produits durables, sans obsolescence programmée. A titre d’exemple, le second marché des textiles n’en réduit pas la production. Le développement des inégalités sociales conduit, soit à la survivance de deux marchés, dont les produits recyclés deviennent les seuls accessibles pour une frange de la population, soit à la production de textiles « jetables » financièrement accessibles à tous, mais générant d’innombrables déchets. De nombreuses enseignes dites de « fast fashion » en sont une triste illustration.

Sur le traitement des inégalités ;

Nous développons des politiques d’insertion professionnelle, plaçant les individus concernés dans une forme d’exclusion sociale, car l’entreprise, et le travail qu’elle propose, n’a plus vocation à permettre la réalisation, l’épanouissement des personnes, y compris aux faibles capacités de production pour quelque raison que ce soit, mais à centrer son objet sur la seule production toujours plus importante et rentable de biens et de services.
Nous développons des services de transports, d’habitats... spécifiques pour certaines catégories de personnes car les services classiques ne sont pas accessibles et créent de la dépendance.
Nous mettons l’eau en bouteille, parce qu’au robinet elle comporte trop de nitrates, que seuls certains pourront boire, nous vendons des purificateurs d’air que seuls certains pourront respirer...autant d’exemples que nous pourrions multiplier qui démontrent, s’il en était besoin, les bénéfices apportés à l’économie de marché, et ses conséquences néfastes pour le développement de la cohésion sociale et la prise en compte de nos environnements.

Sur la transition démocratique ;

L’individualisation des rapports dans les échanges humains par l’approche consumériste ou d’assistance conduit à une forte diminution des collectifs et notamment des corps intermédiaires. Comme le marchand est en relation directe avec son client, l’Elu de la république recherche la relation directe avec ses administrés, se privant des atouts et fonctions des collectifs de citoyens organisés, au sein desquels s’exercent la confrontation de points de vue, la construction de projets et d’actions argumentés, l’apprentissage des responsabilités. La démocratie s’en trouve fragilisée, réduite à un passage tous les 5 ans aux urnes que beaucoup d’entre nous délaissent, de fait. En qualité d’acteurs de l’ESS nous ne sommes pas exempts de ces travers, mais serons vigilants pour que notre ambition de transformation reste le phare de nos travaux.

Nous pouvons être tentés d’agir par la seule mise en œuvre de projets exemplaires. Ils sont incontournables pour démontrer la pertinence de ce que nous défendons mais insuffisants pour atteindre notre objectif de transformation sociétale. Nous avons la responsabilité de coopérer sur nos territoires avec les entreprises implantées, et les élus locaux, pour faire avancer nos idées et rechercher dans leurs parties prenantes les citoyens ambassadeurs de l’ESS.
Mobiliser et entraîner les citoyens collectivement, sur les enjeux ici évoqués, me semble la voie la plus plausible pour transformer, même si elle est rendue extrêmement difficile par l’atomisation des individus, développée partout, pour la domination du marché.

Nous agissons pour une économie plurielle, au service de l’humain et de son environnement.

  • La pluralité économique suppose que soient mobilisées, regardées, promues, évaluées, la mixité des ressources ; marchandes, non marchandes (redistribution) et non monétaires (réciprocité).
  • Le fait associatif comme lieu d’éducation populaire, d’exercice de la citoyenneté, de développement du lien social.
  • La coopération, le mutualisme et leur capacité de construction collective entre adhérents, sociétaires, producteurs, consommateurs, bénéficiaires...
  • Les entreprises de l’ESS aux statuts ; limitant la lucrativité (dividendes), rattachant les pouvoirs dans l’entreprise, non pas au capital mais à l’engagement (une personne = une voix), prévoyant le fonctionnement démocratique au sein de la gouvernance, centrant ses activités sur l’utilité sociale et environnementale.
  • La transformation de notre société pour la rendre plus inclusive, par le développement de biens et de services accessibles à tous, par une approche émancipatrice des individus qui leur permette d’agir par eux-mêmes et collectivement pour eux-mêmes, pour limiter la création, sans cesse, de nouveaux besoins, pour une réduction des inégalités.

L’ESS n’est pas l’économie de la triste vie, du non-plaisir, de la résignation, bien au contraire elle est celle qui doit conduire notre humanité à plus de bonheur et d’intensité, par la réduction de notre consommation pour atteindre le raisonnable, de la production de biens et de services aux durées de vies les plus longues, réparables, à la prise en compte de notre environnement, de sa flore et de sa faune, pour une vie humaine en santé physique et psychique, à la reconnaissance de communs pour dépasser la propriété individuelle. (Saluons à cet endroit l’UNESCO qui vient de donner accès gratuitement à la bibliothèque numérique mondiale).

A la notion de croissance, l’Économie Sociale et Solidaire préfère celle de développement.

Pour l’anecdote, il y a quelques mois je partais à la rencontre du Bouthan, petit pays de l’Asie sur la chaîne de l’Himalaya, ayant choisi il y a plus de 50 ans et à contre-courant du modèle dominant, de fixer comme indicateur de développement la recherche du bonheur. Ce dernier est défini notamment par : le respect de l’environnement - le Bouthan est le seul pays au bilan carbone négatif -, la valorisation du patrimoine culturel, traditionnel, historique, la consommation raisonnée - la publicité y est interdite -, l’accès physique et financier à l’éducation et aux soins pour tous - la criminalité y est marginale -, les inégalités réduites - pas plus de gens à la rue que de grandes fortunes -... Et cela fonctionne !! même s’ils ont également encore des défis à relever.

Soyons-en convaincus, l’ESS sera le cadre de référence de l’économie de demain.
Et pour ceux qui ne le seraient pas encore (convaincus), une marche importante vient d’être franchie grâce à l’engagement de nombreux réseaux de l’ESS ; La récente reconnaissance, par l’assemblée générale de l’Organisation des Nations Unis (ONU), de la contribution de l’ESS à la réalisation et à la territorialisation des Objectifs de Développement Durable (ODD). L’Assemblée générale des Nations unies encourage, d’une part, ses pays membres et ses agences à mettre en œuvre des politiques dédiées et, d’autre part, les institutions financières et les banques de développement à soutenir l’ESS.

Merci de votre attention.
 

Texte issu du Rapport Moral et d’Orientation présenté à l’Assemblée Générale le jeudi 25 mai 2023 à Guingamp.

 

Michel Jézéquel

Président de la Cress et Vice-président d'ESS France

Pour tout savoir sur le projet et les activités de la Cress > Téléchargez la Cress en action 2023

 

Illustration : Ewen Prigent - La Boîte Graphique

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